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Intervenant d'abord en tant que consultant pour un rôle de direction par intérim il y a deux ans, il a définitivement endossé le rôle de patron début 2022 dans un projet familial, son épouse Su Yi Chiu étant la présidente du conseil d'administration de la marque.

De passage dans la capitale française durant la FashionWeek parisienne, le directeur général (CEO) d'Esprit a apprécié l'évènement vitaminé mis sur pied dans un cosmopolite hôtel parisien et affichant le nouveau visage souhaité pour la marque. Le dirigeant, qui a profité de son court séjour à Paris pour rechercher son futur flagship dans le Marais, s'est assis avec FashionNetwork.com pour détailler son plan de route pour la marque dont les structures allemandes avaient été mises sous protection de la justice puis restructurées en 2020.

"Il est vraiment difficile de savoir ce qui est arrivé à la marque sans rembobiner lhistoire. La marque a été créée en 1968 par Douglas Tompkins et Susie Tompkins Buell (qui ont ensuite créé The North Face). C'était une entreprise californienne très cool dans les années 1960, 1970 et 1980. Elle a ouvert à Hong Kong en 1971 et en Allemagne en 1976. Il y avait trois régions, trois propriétaires différents, avec des stratégies différentes. Pendant longtemps, ils ont travaillé ensemble en bonne entente. Mais en 1989, alors que l'entreprise américaine était à son apogée, il y a eu un différend familial. Et à partir de là, lentreprise a changé de propriétaire à plusieurs reprises jusqu'à ce que les États-Unis ferment leurs portes en 1996."

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Afin de se faire une idée de ce qua traversé lentreprise ces trente dernières années, le dirigeant a tenu à rencontrer plusieurs anciens dirigeants dEsprit, afin de connaître les moments de bascule de la société. Et pour William Pak, le transfert du centre de décision vers lAllemagne a été le début de la chute. "Esprit proposait des vêtements de très grande qualité, un lifestyle joyeux et avait une approche très avant-gardiste. Mais vers l'an 2000, elle a déménagé dans une petite ville du sud de l'Allemagne. A lépoque le marché de limmobilier explosait… et ils ont commencé à signer des baux de 30 à 100 ans dont la plupart ont des superficies de 2.000 à 3.000 mètres carrés."

Malgré les plans de fermetures de magasins opérés sur le marché allemand durant la dernière décennie, le dirigeant concède être toujours confronté à de nombreux baux de longue durée et renégocier certains dentre eux pour des fermetures ou des réductions d'espace. "Ils auraient dû fermer beaucoup plus et ensuite se repositionner vers une nouvelle stratégie, mais il n'y a pas eu de nouvelle stratégie pendant des dizaines d'années. Au final, cétait mauvais endroit, mauvaise taille, mauvaise stratégie. A la même époque ils ont voulu suivre le rythme de la fast-fashion avec douze collections par an. Dans toute industrie mature, lorsque le marché est saturé les entreprises commencent à courir après le prix le plus bas pour gagner des parts de marché. Mais il n'y a alors qu'un ou deux gagnants. Il est évident que ce n'est pas ce qu'il y a eu de mieux pour la marque."
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Fort de ces constats, William Pak explique que depuis douze mois le comité exécutif dEsprit vise clairement à repositionner la marque. Le dirigeant précise avoir revu son parc de fournisseurs de 250 usines à 34, avec des spécialistes de chaque catégorie de produits. Mais aussi basculer sa proposition sur quatre saisons, avec une cohérence mondiale.

"L'identité était perdue. Nous avons dû faire un rebranding très fort et nous avons commencé avant l'été. Mais cela représente une année de planification, de stratégie et de construction de relations, et cet automne, c'est la première fois que le marketing de la marque est aligné pour que nous ayons un 'nous' dans le monde. En termes de style, lidée est davoir un look urbain élégant avec une stratégie autour des trois piliers liés à l'héritage : Esprit est ludique, moderne et cool. Nous construisons cette proposition avec une offre pyramidale, avec tout en haut de la collection les produits Hero. Cela pourra être une veste en Shearling plutôt quen laine, un pull en cachemire plutôt quen coton."
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Cette offre, minoritaire en termes de volumes, sera poussée différemment selon les villes, explique le dirigeant, pouvant atteindre 10% de la proposition à New York ou 3% dans dautres cités. Si elle se repositionne, la marque va toutefois garder une offre de basiques et de produits plus accessibles. Par exemple, actuellement sur son site, le poncho en cachemire à 399 euros côtoie le denim rétro à 79 euros, la robe à 59 euros et le haut à manches longues en coton à 25 euros.

Huit éléments clés pour l'offre

Côté produits, léquipe de style a défini huit éléments signatures clés pour asseoir la nouvelle histoire de marque: une parka, un costume fluide, la chemise, le logo avec le développement de produits logotés, le tote bag, la robe portefeuille, une collection denim qui a été lancée durant lété et les jupes légères. Huit éléments qui doivent accompagner Esprit sur plusieurs saisons.

"Ces huit styles sont suffisamment forts pour porter la marque. Quand je suis arrivé, jai voulu que lon plonge dans les archives, dévoile le CEO. Mais il était impossible de trouver les 52 ans dhistoire. Nous les avons cherchés pendant plus d'un an et finalement trouvés en Allemagne de l'Ouest, dans un entrepôt. Tout était là, lhistoire depuis 1968 jusqu'au milieu des années 2010. Cela signifie que les archives navaient pas été exploitées depuis des années. Nous les avons numérisées et maintenant, sans les copier, nous pouvons nous en inspirer et surtout conserver lADN dEsprit."

La puissance de la marque et son positionnement lifestyle des années 1980 semblent fasciner William Pak… tout comme la chute associée à la direction allemande. Alors le dirigeant revitalise la marque par les États-Unis. Si les opérations financières et logistiques sont toujours basées à Hong Kong, le nouveau patron a décidé de créer de nouvelles dynamiques autour des différents services. Il a installé un centre de développement design et technologie à New York, où une centaine de personnes évoluent. Misant beaucoup sur les racines californiennes dEsprit et sur le denim, le dirigeant a aussi décidé de créer un centre d'innovation du denim à Amsterdam, lune des capitales mondiales de la toile bleue. "Il sagissait de créer une équipe dédiée, davoir des experts qui ont des relations avec les meilleures usines et qui connaissent tous les procédés. Avant, cétait la même équipe basée en Allemagne qui réalisait toute la collection de prêt-à-porter."
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Une stratégie à l'accent américain

Pour autant, tant par le poids du réseau de magasins que par sa diffusion sur ce marché, lAllemagne pèse encore la moitié de lactivité dEsprit. Et sur toute lEurope, la marque revendique 160 succursales et 420 franchisés, ainsi que des corners en magasins. Alors pour développer sa nouvelle approche, la direction demande du temps sur le Vieux Continent.

"LAllemagne est un marché historique, mais nous sommes en train de diversifier cela, avance William Pak, qui entend construire son retour par le marché américain, berceau de la marque. Il y a vingt ans, la stratégie consistait à ouvrir des magasins de grande surface dans le plus grand nombre de sites. Ce n'est plus une option pour l'omnicanal. Notre stratégie sappuie sur des flagships. Nous aurons un magasin phare à New York lannée prochaine et nous avons déjà un site éphémère à New York dans Soho, mais nous aurons aussi des magasins régionaux comme à Los Angeles et Chicago qui sont ouverts en pop-up ou Miami et Vancouver qui vont ouvrir dici la fin de lannée. En début dannée prochaine, nous devrions avoir cinq magasins aux États-Unis. Notre volonté est davoir deux magasins dans ces villes dici la fin de lannée prochaine afin de réaliser des économies déchelle. Nous pourrons avoir une quinzaine de magasins, puis 25 lannée suivante. Si vous êtes présent aux États-Unis avec une trentaine de magasins, cela permet de construire la relance. Car cest ensuite un effet de halos. Nous aurons un marketing spécifique dans ces villes clés. Cela aidera nos revendeurs locaux mais aussi le-commerce et renforcera l'image de marque. C'est ce que nous allons faire ensuite en Asie, où nous sommes déjà présents sur différents marchés dans des villes comme Singapour, Hong Kong mais aussi en Corée du Sud et au Japon, ainsi que dans les villes clés en Europe."
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Mais alors quid du réseau de magasins, notamment en Allemagne ? A linstar de son magasin de Düsseldorf, dont un niveau a été fermé afin de focaliser loffre sur le rez-de-chaussée, la marque va réduire ses surfaces, voire les relocaliser. En sadaptant à une clientèle dont le pouvoir dachat a été très marqué par la crise liée à la guerre en Ukraine. Une opération qui devrait être réalisée dans une trentaine de sites dans les prochains mois. Les grandes villes européennes devraient en revanche bénéficier de flagships de 350 mètres carrés dans des emplacements premium, comme le Marais à Paris.

"Nous avons 92 magasins franchisés en France. Et globalement ils sont très demandeurs dune politique de montée en gamme de la marque, avance le CEO. Ils attendent de nouveaux produits, mais ils nous disent aussi avoir besoin dun bon marketing et dun magasin phare pour que la marque gagne en visibilité."

Ce flagship parisien pourrait ouvrir ses portes début 2024. En parallèle, les équipes dEsprit veulent convaincre les grands magasins européens de miser sur la marque et son positionnement revu à la hausse. Et de citer Selfridges, El Corte Ingles, mais aussi Illum à Copenhague, où la marque installera un espace de plus de 200 mètres carrés en novembre.

Et afin dappuyer cette stratégie, le dirigeant glisse revoir lapproche marketing, et réorienter les quelque 15 millions deuros de budget. "Depuis dix ans, la performance du marketing est orientée sur la promotion de la stratégie de démarque dEsprit. En Europe, le positionnement était le plus bas. Il est difficile de changer une image de ce type. Nous avançons avec des approches régionales afin délever la marque. Nous réaffectons les budgets et notre stratégie est orientée sur le plein prix avec un focus sur les villes clés." Le tout en ciblant un consommateur de génération X urbain. Pour lui parler au mieux, la marque a constitué une équipe digitale et dédiée aux réseaux sociaux.

Et pourtant malgré les changements annoncés depuis larrivée de la nouvelle équipe, Esprit est toujours dans une dynamique baissière. La société, étant cotée à la bourse de Hong Kong depuis 1993, publie donc ses résultats. Au premier semestre, ses ventes étaient de moins de 400 millions deuros, avec un résultat négatif. Esprit est dans une spirale négative depuis près de quinze ans. Il y a dix ans, elle pesait plus de 3 milliards deuros de ventes et connaît des pertes sur tous ses exercices depuis.

Redonner une colonne vertébrale à la marque

"La marque est en déclin depuis la crise de 2008, analyse William Pak. Le projet ne correspondait pas à la réalité du marché alors… L'entreprise est restée bloquée. Ils ont essayé de changer et de restructurer. Mais beaucoup de gens sont allés et venus. Et peu d'experts sont restés. Tout était externalisé. Il y avait beaucoup de personnes, pas de stratégie et pas dhistoire. Nous avons passé du temps ces derniers mois à lui redonner une identité. Plutôt que refaire la même chose, notre décision a été de changer la marque. Mais cela nécessite du temps, de largent et de la sueur. Et il ny a pas de résultats immédiats. En général, les actionnaires veulent des résultats rapides.

Mais une renaissance prend du temps, parce qu'il faut nettoyer, investir et ensuite croître. Nous avons nettoyé en investissant. Depuis octobre de l'année dernière jusqu'au premier trimestre, nous avons essentiellement liquidé l'ancien stock lié aux douze collections par an, ce qui a eu un impact sur le résultat net. Nous entamons la phase de croissance ce trimestre avec lexpansion et louverture de magasins et les concepts autour du vêtement. Mon travail ne consiste pas seulement à motiver le personnel, ce qui a été une étape importante, mais aussi les actionnaires et les dirigeants, ou encore les médias. Je vends le rêve. Je suis très clair sur notre stratégie. Notre avantage est davoir des capitaux de long terme qui restent avec nous pour aller jusqu'au bout, c'est ce qui fait la différence avec beaucoup d'autres marques qui essaient de se restructurer."

Si le dirigeant ne détaille pas tous les montants investis, il est clair sur les fondamentaux que son comité exécutif est en train de construire. La logistique et la gestion de la donnée figurent au premier rang des dépenses. La société modernise son infrastructure en implémentant les solutions SAP afin de mieux gérer stocks, tarification et délais. Mais elle a aussi revu son site marchand, sur laspect utilisateur mais optimise aussi ses fonctionnalités et doit donc recruter des profils sur ces métiers… ce qui constitue là aussi des investissements conséquents dans lhumain. Tout ceci devient la colonne vertébrale de la pérennité du projet, selon le dirigeant.

"Je pense quil faut plusieurs trimestres pour identifier le réel besoin et encore quelques trimestres pour implémenter des solutions. Cest au moins neuf mois pour que ces éléments se mettent en place et que lon bénéficie de ces optimisations. Nous avons tout remis à plat. Les premiers retours sont positifs sur les États-Unis. Et cest là que nous aurons les premiers résultats, avance William Pak, qui affiche son optimisme quant à une modération de linflation et une reprise de la consommation en 2024. Mais le plus grand défi, nest pas de définir le besoin. Cest de communiquer pour lever la résistance au changement. La marque est prête. Nous avons résolu les soucis de livraison. Je pense que nous sommes mieux placés maintenant parce que nous avons une nouvelle stratégie qui est différente de celle des autres. Si tout se passe comme prévu, nous saurons au milieu de l'année prochaine à quel point nous avons progressé. Dici là, mon rôle est en fait dêtre Chief motivator et Chief enabler".
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